Mineral Sands Resources c. Christine Reddell, et al., affaire n° 7595/2017, Haute Cour d'Afrique du Sud (Division Western Cape, Cape Town) (9 février 2021)
Des plaintes pour diffamation ont été déposées contre des avocats environnementaux du Centre pour les droits environnementaux (CER) et plusieurs militants. Les prévenus ont invoqué un moyen de défense SLAPP, que la Cour a reconnu comme légitime défense dans cette décision interlocutoire.
Des sociétés minières avaient déposé des plaintes en diffamation contre des militants qui avaient critiqué leurs activités minières. Les accusés avaient publié des livres électroniques, pris la parole dans des interviews à la radio, écrit des courriels, publié sur les réseaux sociaux, mis en ligne un article, etc. Les avocats ont été accusés de diffamation pour des déclarations faites lors d'une conférence à l'université.
Le jugement de la Haute Cour a rejeté les exceptions déposées par la société contre les plaidoyers spéciaux déposés par les défendeurs. Les défendeurs soutiennent que les réclamations des sociétés minières constituent un abus de procédure et/ou des réclamations connexes et que ces réclamations ont été déposées pour faire taire les accusés ainsi que d'autres membres de la société civile. Les sociétés minières demanderesses ont déposé des exceptions à cette défense.
La Haute Cour a examiné les décisions des tribunaux sud-africains ainsi que la manière dont les poursuites-bâillons sont traitées dans d'autres pays. L’ensemble du jugement mérite d’être lu, il contient de nombreuses déclarations puissantes sur « l’importance de l’engagement et du débat libres sur des questions d’importance publique » et les dommages causés à ce discours par les poursuites-bâillons.
La Cour a expliqué en partie :
Para. 64 (note de bas de page omise).
Les individus ou les ONG doivent avoir la liberté de répondre aux problèmes qui affectent la société, tels que ceux liés à l'environnement et au développement durable. Dans les cas où les entreprises pourraient être la principale cause d’un comportement dommageable et destructeur de l’environnement et de la biodiversité, la société civile devrait être autorisée à confronter et à restreindre ce comportement. Des litiges de cette nature constituent une menace sérieuse pour la participation des défendeurs aux questions d'importance publique, en particulier les questions environnementales. Le dialogue et le débat publics avec une large participation sur des questions d'intérêt public, telles que l'environnement, doivent être protégés et encouragés. Toute action en justice visant à étouffer le discours public et à entraver les débats publics doit être découragée.
La Cour a affirmé :
Les entreprises ne devraient pas être autorisées à utiliser notre système juridique comme une arme contre les citoyens ordinaires et les militants afin de les intimider et de les faire taire. Il semble que la poursuite en diffamation ne soit pas authentique et de bonne foi, mais simplement un prétexte ayant pour seul but de faire taire ses opposants et ses critiques. Les litiges qui ne visent pas à faire valoir des droits légitimes, mais qui font partie d’une stratégie large et délibérée visant à intimider, distraire et faire taire la critique publique, constituent une utilisation inappropriée du processus judiciaire et sont vexatoires. L’utilisation inappropriée et abusive du processus judiciaire interfère avec la bonne administration de la justice et porte atteinte aux notions fondamentales de justice et à l’intégrité de notre processus judiciaire. Les poursuites-bâillons constituent un abus de procédure et sont incompatibles avec nos valeurs et notre schéma constitutionnels.
Le droit à la liberté d’expression, à un débat public vigoureux et à la capacité de participer aux débats publics sans crainte est essentiel dans toute société démocratique. Je suis donc convaincu que cette action correspond à l’ADN d’une poursuite-bâillon.
Par. 66-67.
La Cour a ensuite conclu que les défendeurs « les arguments spéciaux (la défense contre la poursuite-bâillon) constituent une défense valide à l'action » et a rejeté les exceptions des plaignants aux arguments.